Après Laure et Sam lors de la Bibliothèque du Comixity #109, Bruno au début du ComixWeekly #289 ou encore Jonat, Kiwi-Kid et Mr Honey Bunny dans un Comixity Spécial, c’est au tour de Marti de vous proposer sa critique du film Batman v. Superman : L’Aube de la Justice.
Si cet article répète certains points déjà soulevés lors des critiques audio, il livre avant tout une réflexion personnelle à la première personnes sur les choix derrières les développements des personnages ainsi qu’une recherche de certaines des influences ayant guidé le réalisateur Zack Snyder et les scénaristes dans l’élaboration du film.
Batfleck begins
Commençons par le point qui était le plus attendu : Ben Affleck fait-il un bon Batman ? Il s’agit du point sur lequel les critiques semblent le plus souvent concorder en plébiscitant l’interprétation du Chevalier noir. La nomination de l’acteur au poste du justicier de Gotham City n’avait pourtant pas commencé sous les meilleurs hospices, une portion de fans allant jusqu’à brandir des pétitions pour évincer l’acteur pourtant connu pour son amour des comic-books. Ben Affleck s’investit dans son rôle tant physiquement que mentalement. Le parti pris de nous exposer un Batman grisonnant et usé par vingt ans de croisade fonctionne à merveille. Bruce Wayne est usé et a commencé à basculer au-delà des limites qu’il s’est toujours fixées dans ses incarnations précédentes. Beaucoup s’en sont offusqués, et pourtant cela ouvre de belles perspectives pour la suite de ses aventures cinématographiques qui pourraient justement s’axer sur la rédemption du héros. Le film est assez avare en détails sur la carrière de la chauve-souris. Le Joker a-t-il tué Jason Todd, ou un autre Robin ? Pourquoi le manoir Wayne est-il en ruine ? Des alliés de Batman se sont-ils retournés contre le laisse sous-entendre une ligne de dialogue ? Cette dernière possibilité rejoint l’hypothèse que le Joker sera un ancien Robin ayant sombré dans la folie et expliquerait d’autant plus la méfiance que porte Bruce à Superman, à présent sur ses gardes même envers les bienfaiteurs.
L’aliénation du personnage à son sombre alter-ego est bien retranscrite dans le film où Bruce semble vivre dans sa Batcave avec Alfred comme seul allié et ami. Le métrage a d’ailleurs le bon goût de ne pas trop s’attarder à décrire le monde de Batman que le spectateur connaît déjà, les véhicules et gadgets sont utilisés lorsque la situation le demande sans besoin d’une scène d’introduction forcée. Si la scène fondatrice de la mort des parents Wayne est à nouveau montrée, elle se justifie par son importance dans un scène-clé du film et nous gratifie d’une superbe mise ne scène très inspirée de Dark Knight Returns. En choisissant de ne pas s’attarder sur ces éléments du mythe de Batman déjà bien installés dans l’esprit des spectateurs, Zack Snyder n’alourdit pas davantage un film déjà bien chargé et renforce le côté expérimenté du justicier. Celui-ci se montre impitoyable contre ses ennemis dans des scènes qui se classent immédiatement dans les meilleurs affrontements de Batman jamais filmés. Le Bruce Wayne de Ben Affleck est également très efficace, taciturne ou séducteur lorsque la situation l’exige. Plus que jamais, Bruce devient le masque que Batman enfile pour se fondre dans la masse lorsque ses enquêtes l’exigent. On regrettera quand même qu’un petit peu plus de temps ne soit pas consacré à Alfred qui passe le plus clair de son temps à bricoler dans la Batcave en ironisant sur la croisade ratée de son employeur. Cette approche du personnage est intéressante, elle s’éloigne des précédentes pour se rapprocher de celle imaginée par Geoff Johns dans Batman: Earth-1, mais les quelques scènes jouées par Jeremy Irons ne lui permettent de réellement dévoiler les différentes facettes du majordome anglais.
Man of doubts
À cette vision un poil extrémisée mais globalement proche de ce que l’homme du commun se fait du justicier Gotham, Zack Snyder oppose un Superman qui fait sans doute davantage débat. La scène d’introduction du Kryptonien représente bien la réalité qui nous présentée : dans cet univers, Superman ne peut pas sauver tout le monde. La symbolique est d’autant plus forte lorsque l’on sait que le photographe assassiné sous nos yeux n’est autre que Jimmy Olsen ! Le nom n’est peut-être pas prononcé dans le film (mais l’est dans le générique), mais le message est clair : le témoin traditionnel des exploits du héros meurt car il est inutile dans un monde sombre destiné à prendre une tournure encore plus tragique par la suite. Le sense of wonder du Silver Age que les films mettant en scène Christopher Reeve retranscrivaient si bien n’était pas au programme dans Man of Steel et le sera encore moins ici. La déception de ceux qui recherchent cela dans un film de Superman est compréhensible. Pourtant, on ne peut pas reprocher à Zack Snyder d’essayer de faire quelque chose de différent avec son Superman. Et quelque part, ce film interroge justement notre capacité à accepter l’intrusion de l’héroïsme altruisme, et même carrément miraculeux, dans un monde qui en a pourtant bien besoin. Si Superman apparaissait aujourd’hui dans notre monde, nos réactions seraient-elles si différentes que celles présentées dans le film ? On peut ne pas vouloir regarder un film de super-héros se voulant aussi sombre et sérieux, mais il serait injuste de reprocher à Batman v. Superman d’essayer de le faire.
On peut également ne pas être sensible à toute l’imagerie messianique appuyée par la caméra de Snyder, mais elle fait pourtant parti de l’ADN du personnage. Mélange improbable de Moïse et du Golem imaginé dans les années 30 par des immigrants juifs qui ressentaient – avec raison – le besoin de proposer une figure protectrice, Superman a évolué vers une figure christique si ce n’est divine, embrassant allègrement son statut de dieu solaire des temps modernes. La présence d’un tel personnage sur Terre ne peut qu’interpeller la population qui ne peut pas naïvement l’adorer à l’unisson. Quant à l’abus d’images christiques, les comics qui pointent de ce sens sont pourtant là. L’exemple le plus frappant de la lance de kryptonite rappelant celle du centurion Longinus blessant le Christ qui trouve bel et bien son origine dans plusieurs histoires issues des comics !
Beaucoup opposent les films de Snyder à l’atmosphère enthousiaste des productions de la Maison des Idées d’en face. Pourtant, les thématiques abordées dans les films DC se retrouvent également chez la concurrence : dès le premier Iron Man l’institution (ici représentée par le S.H.I.E.L.D.) tente de la contrôler, Hulk est une menace poursuivie par toute l’US Army, la divinité de Thor est sans cesse remise en doute, Captain America souffre des affres de la guerre, les Avengers ne peuvent stopper une invasion extra-terrestre sans qu’une grande partie de New York, bâtiments comme population, y passent. Et chez Marvel, ce sont deux demi-douzaines de héros qui vont s’affronter prochainement dans Captain America: Civil War ! Aucun studio n’ignore donc les dégâts matériels et l’impact psychologique de l’apparition des surhommes, mais la forme diffère. Et tant mieux ! Le lecteur de comics qui apprécie la distraction aussi bien que l’introspection est gagnant, on ne lui impose pas un seul registre sur lequel les films du genre se calquent inexorablement.
Et Superman dans tout ça ? Ses faiblesses, sa difficulté à trouver la bonne attitude à adopter le rendent justement plus qu’humain ! Le Superman d’Henri Cavill n’est pas le Superman de Christopher Reeve tout simplement parce qu’il n’arrive pas (encore ?) à l’être. Et en ce sens, il devient tout aussi intéressant que les précédentes incarnations qui l’ont précédé et qui ont gravé l’image du boy-scout infaillible dans l’inconscient collectif. Si le profane se retrouve à accepter plus facilement un Superman qui sort des clous, le lecteur de comics confirmé devrait pourtant être le premier à être habitué à voir un Superman qui doit faire ses preuves face à la société. L’événement Legends de 1987 se basait sur ce postulat à une échelle plus grande avec l’ensemble de la population super-héroïque mise à mal. Au début des années 2000, Jeph Loeb déclarait Superman et Batman ennemis publiques dans son premier story-arc de Superman/Batman. La fin de la série animée Superman de Bruce Timm tout comme la seconde saison de l’excellente Young Justice se basait sur l’idée d’un Superman pour le premier et l’ensemble de la caste costumée pour le second qui étaient honnis de la population. Certes, les super-vilains ne sont jamais étrangers à l’impopularité des héros, mais la solution au problème se règle inexorablement par un véritable travail de longue haleine. Reprocher à Batman v. Superman de jouer sur le tableau de la méfiance envers les surhommes, c’est reprocher au film de s’inspirer du fond d’idées qui anime les comics ces dernières années plutôt que de revenir encore une fois aux fondamentaux. J’adore toujours les deux films de Richard Donner pour leur optimisme inébranlable. J’ai défendu Superman Returns qui est une magnifique lettre d’amour à ce sens du merveilleux perdu. Et pourtant, je ne fais que me réjouir de voir cette nouvelle approche de Superman. Que ce soit dans ce film ou Man of Steel, la prestation d’Henri Cavill comme l’écriture prise par son personnage ne font pas parties de mes reproches.
Les vilains qu’ils méritent ?
Je serai plus divisé sur la prestation de Jesse Eisenberg en Lex Luthor légèrement hystérique. Ironiquement, cette version mégalomaniaque est peut-être ce qui rapproche plus ce film de la série classique avec Christopher Reeve et le Lex Luthor grandiloquent de Gene Hackman. Eisenberg cabotine quand il ne surjoue pas un personnage dont les failles viennent avant tout d’une écriture poussive. Son plan infaillible est également tiré par les cheveux quand on y réfléchit posément au moins quelques secondes : une fois la mère adoptive de Superman morte, n’y a-t-il pas un risque qu’il vienne atomiser Lex avant que celui-ci ne lâche Doomsday ?
Parlons-en justement de la grande menace de terrain qui débarque à point nommé pour le combat de réconciliation finale. Son origine est assez obscure, on ne comprend pas pourquoi Lex mélange son ADN à celui de Zod avant de tenter de le ressusciter. Son utilisation de Doomsday parait également un peu simpliste puisqu’il est évident que la créature échappe totalement à son contrôle et que rien ne semble prévu pour pouvoir l’arrêter. Et même s’il parvenait à tuer les deux héros et à contrôler sa créature, quel serait son plan sur le long terme ? Une scène coupée qui le montre en train de converser dans le vaisseau kryptonien avec ce qui pourrait être un New God (les paris vont pour Steppenwolf ou Yuga Khan) sous-entend qu’il préparait pour la suite et rend ses paroles finales en prison moins cryptiques : Luthor préparerait l’arrivée de Darkseid pour les prochains films !
Un monde en construction
Un autre problème du film découle de cette volonté d’être le point de départ réel de l’univers partagé. Le premier pont avec les futurs films est évidemment l’apparition de Wonder Woman dont le peu de temps à l’écran aura gêné plus d’un. Personnellement j’ai bien aimé la prestation de Gal Gadot qui arrive à aligner le mystère, la majesté et la férocité nécessaire pour que l’on croie à la présence de la guerrière amazone. J’ai tout de même ressenti un peu de frustration à ne pas en apprendre plus sur elle ; si le but de la manœuvre était d’en garder un maximum sous la pédale pour nous donner envie de voir les prochains films, l’opération semble réussie. Le revers de la médaille reste que l’on a parfois l’impression de voir un ersatz de Catwoman, une impression donnée notamment par le jeu du chat et de la (chauve-)souris qui s’opère entre elle et Bruce ainsi que de sa fortune inexpliquée. Je reste plus circonspect sur les caméos des autres futurs membres de la Ligue de Justice. Ceux-ci sont insérés d’une manière plutôt maladroite et forcée. Mention spéciale à celle d’Aquaman qui sur le coup paraît un peu ridicule, ou tout du moins caricaturale.
Cyborg nous gratifie par contre d’un easter egg très conséquent pour la suite de la franchise et aussi d’un clin d’œil amusant puisque le rôle de Silas Stone est joué par Joe Morton… l’acteur qui incarnait Miles Dyson, l’inventeur des robots dans la franchise Terminator ! Je n’ai pas pu m’empêcher de tiquer aux logos déjà attribués aux différents personnages alors qu’ils ne semblent pas avoir commencés une carrière sous les feux des projecteurs, et même en costume tout court pour Flash. Celui-ci a droit à une autre apparition plus importante plus en amont dans le film lors de la fameuse scène du rêve prémonitoire qui reste sans doute le plus gros build up pour la suite de la franchise et le moment le plus intrigant de tout le métrage.
Mad worlds
Véritable film dans le film, cette séquence m’a littéralement scotché. Cet instant Elseworld nous plonge sans crier gare dans ce qui semble être le futur enjeu des films Justice League en convoquant des ambiances de fin du monde que l’on ne penserait pas voir dans ces films. En effet, la Terre semble avoir perdue – ou n’est pas loin d’être défaite – face à Superman et une horde de Paradémons… Vous avez dit Darkseid ? Tout porte à le croire, puisqu’on peut apercevoir son logo tracé sur le sol tandis que des puits crachent des flammes vers le ciel. Si l’esthétique a des furieux airs de Mad Max (sortie l’an dernier du quatrième opus oblige), l’inspiration est définitivement à chercher du côté des comics. Tout d’abord Injustice avec son Superman qui a pété les plombs suite au meurtre de Loïs dont une mort future dans l’univers cinématographique est plus que suggérée. Et ensuite la récente série Earth-2 où Superman tombait sous l’influence de Darkseid envoyait ses hordes de Paradémons creuser des puits de flamme imitant ceux d’Apokolips sur une Terre alternative. Batman quant à lui n’est pas sans rappeler la version tourmentée imaginée par Grant Morrison pour le Batman #666 qui enfilait déjà un trench coat avec classe. Puissante, cette mise en abîme dessert presque le film tant elle donne envie d’être prolongée davantage et rattrape la maladresse des caméos. Son effet pervers reste qu’avec la fin ouverte, elle prive en quelque sorte le film de son identité en tant qu’entité unique puisqu’une scène de plusieurs minutes ne deviendra entièrement compréhensible que grâce aux films suivants.
Puisqu’on a fait le tour de la plupart des inspirations évidentes (n’hésitez pas à étayer la liste dans les commentaires !), il est temps de toucher quelques mots sur l’influence de Frank Miller qui se fait ressentir à de nombreuses reprises : la mort des parents Wayne, la Bat-armure ou encore la violence dont fait preuve le Chevalier noir. Zack Snyder n’est pas du tout étranger à l’univers de Miller puisqu’il a adapté son comic-book 300 et en a produit la suite exclusivement cinématographique. S’inspirer de son œuvre culte paraissait donc un cheminement logique, tout comme cela offrait une piste intéressante pour présenter un Batman différent. Ce qui est intéressant, c’est que Zack Snyder va encore plus loin que Frank Miller. Chez ce dernier, Batman finit par prendre une retraite (forcée) alors que Snyder nous laisse à penser que son Batman ne raccrochera jamais la cape. Son Batfleck est également plus violent que celui de Dark Knight Returns. Contrairement à l’idée reçue, Batman ne tue pas des malfrats dans l’œuvre culte de 1986 ! Batman fait bien attention à utiliser des balles en caoutchouc pour les mitrailleuses de sa Batmobile, et si une scène parait ambiguë (lorsqu’il tire sur un membre du gang des Mutants) la mort du méchant peut être sérieusement remise en cause puisque la police ne rajoute l’accusation de meurtre aux charges retenues contre le justicier qu’après la mort du Joker… que Batman ne peut se résoudre à tuer, le Clown Prince du crime finissant par se suicider !
Chevaliers clairs-obscurs
Les inspirations des scénaristes du film ne sont pas qu’à rechercher dans les comics ou la symbolique religieuse. Le combat entre Superman et Batman m’a particulièrement frappé tant on peut y voir une nouvelle variation du mythe arthurien. Classiquement, Superman est présenté comme une itération moderne du chevalier pur, sans peur et sans reproche. En nous proposant sa version du Kryptonien, Snyder ne s’éloigne pas tellement que ça de certaines figures des différents canons arthuriens. Superman devient un peu une nouvelle itération de Perceval : intimement pur, il se voit dépassé par la dureté d’un monde dont il a longtemps été tenu à l’écart et qu’il a parfois du mal à appréhender. Son combat final avec Batman (le chevalier noir !) renvoie à des combats émaillant les différents canons du mythe. On retrouve tout d’abord la propension des chevaliers à se battre entre eux. Que ce soit par défi amical, méprise ou tromperie, les chevaliers de la Table ronde s’affrontent tellement que c’est à se demander s’ils ne sont pas leur principale cause de malheur ! Arthur et Gauvain se rapproche suite à un entrainement très musclé, le duel qui oppose Tristan et Lancelot en fait les meilleurs amis du monde, le vaniteux Keu se mesure à Perceval et Yvain… La félonie les pousse également à s’entre-tuer, notamment par les manigances du fourbe Mordred, le trickster (les manipulateurs dont Loki est la figure la plus parlante) dont Luthor devient un avatar. Comme l’on fait remarquer mes collègue lors du podcast consacré au film, on peut légitimement se demander si Luthor ne sera pas pour la Justice League ce que Loki a été dans la formation des Avengers.
À côté de la référence évangélique, la lance de kryptonite rappelle également les armes fabuleuses capables de terrasser les guerriers les plus puissants (Superman) et même les dragons (Doomsday). La comparaison avec l’épée Excalibur est ici assez intéressante. La lance prend en effet le chemin inverse d’Excalibur. L’épée magique apparaît miraculeusement hors d’un lac, tendue par la main de la fabuleuse Dame du lac, et y est restitué à la mort du roi suite à son combat contre Mordred. La lance est elle tout d’abord envoyé dans un point d’eau après un combat acharné (et quasiment fatal) avant qu’un personnage féminin fort (Loïs) ne l’en extrait. La symbolique religieuse reprend également ici le dessus puisque l’arme négative devient positive après un véritable rituel de purification par l’eau. On pourrait même pousser le raisonnement plus loin en présentant Martha Kent comme la princesse retenue prisonnière par les soldats du chevalier fourbe (Luthor) et son dragon (Doomsday) !
Tout ceci vous paraît un brin surinterprété ? Je vous renvoie alors à la scène de la mort de Bruce. Lorsque la famille Wayne sort du cinéma, on peut clairement distinguer que le film Excalibur de John Boorman est à l’affiche ! Plus qu’un simple repère temporel, ce clin d’œil enracine non seulement les points communs entre le film de Zack Snyder et les légendes arthuriennes, mais le rapproche aussi du film de 1981 avec lequel il partage de nombreux points communs ! De chacun de ces deux longs-métrages se dégagent une étrange aura mélancolique, renforcée par leur esthétique très léchée et iconique (mais tout de même différentes) respective. Le film de John Boorman ne manque pas d’affrontements entre chevaliers pourtant combattant pour le même côté tout comme on y retrouve la figure de Mordred ou encore de l’apparition et de la disparition d’Excalibur.
Les allégories religieuses, ou tout du moins cultuelles, continuent jusqu’aux derniers instants du film. La mort de Superman permet en quelque sorte une renaissance de Batman. Celle devrait s’opérer dans un prochain film (Justice League ?) par la quête que Bruce se fixe : retrouver et unir les autres métahumains. Cette mission pourrait prendre la forme d’un rituel de purification comme on en trouvait dans de nombreuses civilisations antiques dans les faits comme dans leurs mythes, à l’instar d‘Hercule réalisant ses fameux Travaux pour s’absoudre du meurtre de sa femme et de ses enfants. Pour en revenir à une optique plus chrétienne, cette quête serait le pèlerinage entrepris par le héros pour s’offrir une petite virginité au niveau de ses péchés.
Batman v. Superman : L’Aube de la justice mérite-t-il tout le bad buzz qu’il a généré ? Clairement, non. Le film ne peut que diviser par son fond (en particulier par sa caractérisation inédite de certains personnages) que par sa forme (la volonté affichée de créer un tout nouvel univers partagé), mais chacun pourra lui trouver des qualités tant il est (trop ?) riche dans ce qu’il nous offre à voir. Le long métrage de Zack Snyder a également pour lui de faire discuter intelligemment ses admirateurs comme ses détracteurs comme rarement un blockbuster cinématographique l’a fait avant lui. Il y a fort à parier que la suite de la saga cinématographique des héros DC nous fournira de nouvelles clés pour apprécier – ou tout du moins comprendre – cette œuvre.
Merci Marti, pour ton analyse souvent pertinente, j’étais passé complétement à côté de la référence à Arthur et de ses chevaliers de la table ronde, qui est pourtant évidente, ceci étant dit, si je te rejoins sur la personnification de Batman par Ben Affleck et dans une moindre mesure sur la Wonder Woman de Gal Gadot, personnellement j’ai trouvé BVS raté et ce à plus d’un titre. Pour commencer, Superman est le grand absent de ce film, car le personnage que nous présente Snyder en est une très pâle représentation, là où tu y voit de l’humanité, je n’y vois qu’un insondable vide, cet être tourmenté, qui se raccroche à un ersatz d’humanité par le biais de Lois Lane et qui durant tout le métrage ce demande bien ce qu’il fout dans cette galère (autant l’acteur que le personnage) n’est en rien Superman et ce, quelle que soit l’époque de son incarnation. Superman est un héros solaire, il incarne l’espoir, la compassion et la justice et si il est vrai que plus d’une fois, dans les comics il a pu douter, jamais il ne s’est départi de l’espoir au profit de la dépression, mais peut être est-ce due aussi au fait que Snyder est choisi le parti prit de faire disparaitre Clark Kent (qui est son véritable encrage d’avec l’humanité) au profit de son héros messianique ; en le transformant en une icône, Zack Snyder a fait de Superman une coquille vide.
Je ne m’attarderai pas trop sur le cas de Lex Luthor, qui lui, pour le coup, ne fait référence à rien, sauf peut être au Joker, tellement son jeu hystérique et ridicule est à des années lumières du vrai Luthor, c’est simple, j’ai ressenti la même empathie pour ce personnage qu’avec le Doom dans les Fantastic Four de Josh Trank.
Vient ensuite »l’insert » des futurs membres de la Justice League, outre le fait que leurs premières apparitions ce fassent d’une manière plus que discutable, la représentation qui nous en ait offert ne m’a pas du tout donné envie d’en voir plus, entre un Aquaman à deux doigts de se noyer, un Barry Allen Hippie et un cyborg entouré de boites mères, non merci, je passe mon tour et que dire du rêve/futur/prémonition de Batman ?
Hormis que c’est peut être un des rares moments jouissif de ce film, et qu’il nous donne un aperçu d’un futur qui n’arrivera jamais, je ne vois pas, à si ! l’arrivée d’un Flash (façon Crisis) mais avec une armure style Injustice, j’espère franchement que le Flash ciné n’auras pas ce costume, car j’en connais beaucoup qui vont allé jusqu’à regretter Grant Gustin.
Reste la fin, le »moment climax » de BVS, Doomsday’s here !!!
et là, je ne dirais qu’une chose, le trop plein d’images de synthèse, tue le peu de crédibilité que pouvait avoir encore BVS, torché en deux coup de cuillère à pot et nous affligeant d’une fin navrante à l’image de tout le reste, le métrage se termine tristement dans un cimetière où repose (pour pas longtemps) Jés…pardon Superman et avec lui tout nos espoirs de voir un jour rendre justice sur grand écrans à ces héros qui on accompagnés tant de générations.
Ah oui, au fait, ça s’appelle BVS, alors qu’en est-il de ce fameux combat de titans ? et bien contre toute attente il est pas mal troussé, hormis le dénouement qui est lui d’une stupidité insondable, mais qui ouvre la voie à la plus formidable représentation d’un Batman en action qui m’est était donné de voir.
Bien heureusement, tout n’est pas à jeter dans BVS, mais est ce que ça vaut de s’infliger plus de 2h30 d’un ennui mortel pour quelques scènes ? je ne le croit pas, que le ton du film se veuille plus sombre que les Marvels, ne me dérange pas du tout et serait même un plus, maintenant l’histoire que j’ai trouvé extrêmement pauvre (désolé Marti) est loin de supportée les ambitions d’un Zack Snyder en roue libre, s’asseyant allégrement sur tout ce que représente les héros de DC.
Ce film est au mieux, un elseworld sans âme et définitivement pas le socle d’un univers DC cinématographique.
Merci pour cet excellent article Marti!
Effectivement l’analogie avec le mythe des chevaliers de la table ronde est présent dans tout le film.
D’ailleurs de mémoire, tu parlais de Mordred (fils de Arthur et de Morgane), mais je crois que le dénouement de son affrontement final avec Arthur, rappelle étrangement une scène du film, si tu vois ce que je veux dire.
Je suis stupéfait par le travail titanesque de l’auteur de cet article (marti donc…), c’est admirable…mais cela achève de me convaincre que ce film est un gloubiboulga de symbolismes totalement indigestes et irritants , frisant parfois le ridicule.
Sous pretexte d’un « intellectualime » somme toute assez pauvre qui semble destiné à flatter l’orgueil du réalisateur, le scénario est oublié pour sombrer dans les raccourcis et les incohérences fatales pour un film qui affiche tant de sérieux et de premier degrès.
Je rejoins totalement l’avis de mon voisin du dessus: Snyder se fait plaisir et part dans un délire mystique…Pauvre Superman, pour le coup crucifié par son démiurge, qui erre comme une ombre dans ce DCversefroid et désincarné.
C’est amusant, je suis d’accord avec quasiment tous tes arguments, et en même temps je pense le contraire à l’arrivée en trouvant le film vraiment raté. Disons qu’on a eu à peu-près le même regard, mais pas avec la même philosophie !
Je mettrais toutes ses qualités dans sa première moitié (la première séquence est une merveille), et tous ses défauts dans le seconde (le dénouement, les combats, et notamment celui avec Doomsday, font partie de ce que j’ai vu de plus idiot en matières de super-slips au cinéma – avis strictement perso).
La scène de caméo pour les futurs membres de la JLA remporte le pompon du portnawak et ne me donne pas envie d’aller voir des films sur ces personnages !
Pour le reste, ton article est impressionnant, en ce sens que tu as trouvé un équilibre entre le plaisir décomplexé du fanboy, la profondeur de l’analyse et l’exhaustivité des éléments référentiels !
Brillant ! Je suis convaincu par tes histoires de table ronde !
Merci pour vos commentaires !
@Erik : Plus j’y pense plus je me dis que ce Luthor avait du potentiel, les copains du site l’expose bien dans le podcast consacré au film par le commentaire de ses quelques scènes intéressantes (notamment lorsqu’il agenouille Superman). Un élément m’est apparu après-coup : et si Luthor était jaloux de Superman car lui aussi est un immigré (né en Allemagne de l’Est, on peut d’ailleurs penser que le Lex Luthor Sr évoqué est un clin d’oeil au Alexei Luthor du Golden Age) et aimerait jouir de la même notoriété que le Kryptonien. Il est intéressant d’ailleurs de constater que comme pour les deux héros son père est mort (dans des conditions à découvrir plus tard ?), renforçant le côté « chevalier renégat » du personnage par rapport aux deux autres héros.