Comics et diversité : le traitement des personnages musulmans – Deuxième Partie

Une mise en avant plus poussée à partir de la fin des années 2000

Salut à toutes les Comixtoyennes et tous les Comixitoyens ! Chose promise, chose due, voilà la seconde partie de mon long article sur le traitement des personnages musulmans dans les comics  (pour la première partie, c’est par ici), un projet qui m’aura pris beaucoup plus de temps et d’énergie que prévu (au point d’être scindé en deux parties) mais qui je l’espère vous apportera autant de plaisir à la lecture que j’en ai eu à l’écriture !

La première moitié des années 2000 a donc présenté des premières tentatives de représentations de super-héros musulmans « positifs » sans pour autant en faire des personnages de premier plan. Les choses vont toutefois changer à partir de la fin de la décennie, les éditeurs misant sur de grosses franchises comme Green Lantern ou Batman, mais aussi d’autres un peu mois sous le feu des projecteurs mais tout aussi intéressantes et tout autant réussies. À nouveau l’article s’intéressera principalement aux opérations menées par Marvel et DC, avec toutefois un petit détour du côté de productions plus confidentielles pour le grand public occidental mais pas sans lien avec la production des Big Two de l’industrie.

Une femme à la Table Ronde

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Une nouvelle arrivante qui ne laisse ni les lecteurs ni ses partenaires indifférents…

En 2008 l’univers Marvel subit de plein fouet Secret Invasion, un event racontant la lutte des super-héros face à l’armée extra-terrestre des Skrulls qui veulent envahir la Terre. Touchant la plupart des séries de la maison d’édition, cet évènement est aussi un prétexte pour lancer de nombreuses nouvelles séries telle que Captain Britain & the MI: 13, un essai parmi tant d’autres d’utilisation du catalogue des héros britanniques de la boite. Paul Cornell  scénarise tous les épisodes du titre qui découle en fait de sa mini-série Wisdom (comme bien souvent on fait appel à des britanniques pour écrire ces héros-là), assisté la plupart du temps par le dessinateur Leonard Kirk. Rassemblant un casting des héros britanniques que sont Captain Britain, Pete Wisdom, Black Knight (le Chevalier Noir chez nous) ou encore Spitfire, mais aussi des nouveaux sous la forme de John le Skrull [1] et Faiza Hussain. Nouvelle recrue du MI: 13 suite à l’invasion, Faiza Hussain est une doctoresse fan de super-héros qui se retrouve dotée de superpouvoirs suite après avoir été prise dans un affrontement entre les aliens et les héros (une origine pas plus farfelue que d’autres), l’amenant à être le personnage à travers lequel les lecteurs sont amenés à s’identifier. Jusque-là rien de neuf sous le soleil, des personnages de ce type courent les comics existant au moins depuis l’apparition de Robin en 1940. Toutefois, le nom du personnage ne sonne pas vraiment anglais et pour cause : Faiza Hussain vient d’une famille pakistanaise ayant émigrée au Royaume-Uni (comme beaucoup de personnes suite au passé colonial unissant les deux pays) et, histoire d’enfoncer le clou, Paul Cornell en fait une musulmane croyante portant le voile. Le nom du personnage est un hommage à  Nasser Hussain, un joueur de cricket ayant également des origines pakistanaises.

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Faiza contre les vampires, ou une idée symboliquement forte.

Utiliser un tel personnage comme élément auquel les lecteurs doivent s’identifier est un pari osé que le scénariste remporte finalement haut-la-main ! Désireux de ne pas s’enfermer dans les clichés concernant les musulmans mais au contraire de montrer qu’ils sont parfaitement intégrés à la société britannique, Cornell a pris soin de consulter plusieurs musulmanes pour l’écriture de son héroïne et, surtout, ne la traite quasiment pas en tant que musulman mais seulement en tant que jeune femme découvrant le monde merveilleux des super-héros. Ses origines pakistanaises vont être surtout exploités de manière symbolique, puisque la jeune femme retire ni plus ni moins que l’épée Excalibur de son rocher, se payant même le luxe de ressusciter au passage un Captain Britain tombé face aux Skrulls ! Nouvelle gardienne de cette épée (se l’attribuant même par la suite comme nom de code), elle devient également la disciple de Black Knight, une romance sous-jacente malheureusement peu développée à ce jour à la clé. Sa religion finit toutefois par être abordée réellement dans le dernier arc de la série impliquant Dracula qui reconnaît en elle un « vieil ennemi », ayant combattu dans la vraie vie comme dans la fiction l’expansion de l’Empire Ottoman lorsqu’il n’était encore que Vlad Tepes [2]. La symbolique derrière les intrigues concernant Faiza Hussain semble donc être la suivante : en acquérant l’épée Excalibur à la fois comme objet et comme nouveau nom elle devient en quelque sorte le nouvel esprit du Royaume-Uni, ressuscitant même son prédécesseur et commençant une romance par un de ses plus fameux gardiens, et ne rencontre comme ennemi personnel qu’un reliquat du passé violent et xénophobe qu’ils finissent par vaincre. Malgré de bonnes critiques les ventes sont faibles et la série n’ira pas plus loin que cette aventure, s’achevant après quinze numéros et un annual suite auxquels Faiza n’apparaît plus sauf lors de très rares caméos dans d’autres séries. Faiza Hussain a toutefois eu droit l’an dernier à une apparition le temps d’un épisode se passant dans le monde alternatif d’Age of Ultron dans l’épisode Avengers Assemble #15AU d’Al Ewing et Jackson « Butch » Guice, où Captain Britain y passe pour de bon et lui offre de porter son titre. C’est vers cette logique que semblait aller les plans de Paul Cornell pour le personnage si sa série avait continué, et il semblait également avoir des révélations à faire sur son passé qu’il décrivait comme « sinistres » sans plus de précisions. Malgré la courte de vie du titre et la caractère finalement assez confidentiel du personnage le pari aura été réussi car applaudi par les critiques, et adjoindre à Faiza Hussain un passé sombre aurait peut-être même pu diminuer la force d’un personnage que Paul Cornell avait réussi à décrire comme une anglaise comme les autres.

Justice League of Arabia ?

Les 99, une équipe (presque) aussi nombreuse que son nom l'indique !
Les 99, une équipe (presque) aussi nombreuse que son nom l’indique !

Chez DC peu de réelles tentatives pour introduire des héros plus ou moins ouvertement musulmans depuis Muhammad X semblent tentées. Les personnages musulmans, ou du moins originaires de pays à majorité musulmane, ne manquent pas du côté des ennemis comme les classiques Ra’s al Ghul ou Black Adam, mais leur religion n’est jamais évoquée et dans ces cas-là on a affaire des personnages ayant sans doute dépassées leurs croyances depuis longtemps, le premier étant un mégalomane immortel et les suivants tirant leurs pouvoirs d’autres divinités.Toutefois, le changement va commencer à s’opérer dans une histoire qui titre ses racines dans une amitié, celle du légendaire editor-in-chief [3] Paul Levitz et Naif Al-Mutawa. Si le second nom n’évoque rien de prime abord au lecteur même chevronné de la Distinguée Concurrence il le sera plus à celui qui s’intéresse aux parutions en langues arabes. Depuis la montée des sentiments antimusulmans suite aux attentats du 11 septembre, Naif Al-Mutawa s’est donné comme but de redresser l’image de l’islam et de combattre les extrémismes, et plus particulièrement auprès des populations musulmanes elles-mêmes. Pour cela il invente The 99, un comic-book aux héros musulmans dont les pouvoirs sont basés sur les 99 noms et attributs d’Allah décrits dans le Coran. Si cette série est pensée en premier lieu pour un public musulman, elle a également comme but de faire le pont pour les amateurs de comics du monde entier, reprenant les ingrédients habituels du genre : superpouvoirs, noms de code, forces du Mal et même les costumes moulants colorés ! Si Naif Al-Mutawa est la véritable tête pensante et force motrice du projet qu’il lance via la société Teshkeel Media Group dont il est le PDG, il s’entoure de tous un panel de scénaristes et artistes chevronnés de l’industrie américaine que sont Fabian Nicieza, Stuart Moore, June Brigman, Dan Panosian, John McCrea, Ron Wagner, Sean Parsons et Monica Kubina. Les histoires de cette série ont tout ce qu’il y a de plus classique, lorgnant aussi bien du côté des X-Men, des Fantastic Four ou encore de la Justice League : ayant acquis des superpouvoirs liés aux 99 noms et attributs d’Allah via d’anciennes pierres mystiques appelées Noor, des jeunes gens sont rassemblées sous la tutelle de la figure bienveillante et socialement engagée du Docteur Ramzi pour affronter des menaces telles que Rughal, un terrible ennemi basé directement sur Oussama Ben Laden.

Les 99 font la part belle à une certaine diversité dans ses rangs
Les 99 font la part belle à une certaine diversité de personnages dans ses rangs.

Si les inspirations religieuses sont clairement affichées, celles-ci relèvent finalement plus des vertus et conseils prodigués par la religion musulmane que par les dogmes en eux-mêmes, la lutte contre le Mal est physique mais aussi morale avec la mise en avant de vertus comme la générosité et la compassion ; on est finalement assez proche du processus ayant motivés la création des héros américains défendant des valeurs judéo-chrétienne qui certaines valeurs proches de celles des 99, rappelant par la même occasion les liens et bases communes des différentes religieux monothéistes. Cette série se paie même le luxe d’être plus égalitaires dans ses rangs que bons nombres d’équipes occidentales puisqu’on y retrouve une proportion à peu près similaire de membres masculins et féminins et que la diversité ethnique y est très variée. La question des divergences d’opinions au sein de l’islam est également abordée, comme dans l’exemple d’une héroïne yéménite portant une burqa, mais n’échappant pas pour autant au justaucorps moulant coloré dans la pure tradition super-héroïque, bien loin des restrictions vestimentaires que l’on pourrait s’attendre à voir dans une telle série. Lancée en 2006, la série continue toujours aujourd’hui à paraître dans le monde musulman et remporte un succès tel qu’en 2009 est ouvert au Koweit le premier des cinq parcs à thèmes basés sur elle a ouvert et que la célèbre société audio-visuel Endemol produit même une série animée depuis 2012 ! Aux États-Unis seuls les sept premiers numéros auront été traduits en 2007, mais le succès de la série est toutefois reconnu par le président Barrack Obama lui-même [4], louant le combat pour la tolérance de Naif Al-Mutawa lors d’un sommet sur l’entreprenariat [5].

JLA/The 99
Quand les icônes de l’Amériques rencontrent les héros du monde musulman !

L’amitié entre Paul Levitz et Naif Al-Mutawa donne naissance en octobre 2010 au crossover en six parties JLA/The 99 qui voit se rencontrer l’équipe musulmane et la Justice League of America. Pour l’occasion les membres de cette JLA sont un mélange entre des classiques comme Superman, Batman ou Barry Allen/Flash et d’autre issus de la « diversité » tel que le Green Lantern John Stewart, Vixen ou encore la Doctor Light japonaise. Stuart Moore et Fabian Nicieza retrouvent les personnages avec  Tom Derenick aux dessins. Unis pour combattre Rughal et des vilains DC comme Starro, les personnages des deux firmes se rencontrent pour un crossover certes hors-continuité mais qui marque le coup comme une belle coopération entre une maison d’édition américaine souvent taxée d’un certain conservatisme, mais aussi entre leurs icônes, véritable symboles du soft power américain, et une équipe issue du monde arabe. Si aucune autre rencontre entre les 99 et l’univers DC n’a été planifié depuis, la maison de Superman et Batman a par la suite donné naissance à deux tentatives très remarquées de héros musulmans, l’un d’eux débutant même simultanément à JLA/The 99.

Le parkour du Batman of France

Plutôt que de passer par la petite porte comme Marvel qui n’a finalement introduit ou développé ses héros musulmans qu’au travers de séries mineures et souvent éphémères, DC veut frapper un grand coup en utilisant sa licence la plus lucrative : Batman. Le personnage est alors très marqué par le run de Grant Morrison qui développe au début des années 2010 le concept de Batman Incorporated, une association de héros liés à Batman protégeant des villes à travers le monde (et réinvention moderne de la vieille histoire des Batmen of All Nations qui avait servie de modèle pour celle des Green Arrow of the Worlds évoqués dans la première partie de cette étude). Ce n’est pas Grant Morrison qui va inventer « le Batman of France » (sic) mais le scénariste anglais David Hine, un auteur connaissant bien la France et tout particulièrement Paris pour y avoir déjà vécu quelques temps. L’introduction de Nightrunner a lieu dans une histoire en deux parties réunies dans les annuals de l’année 2010 des séries Detective Comics et Batman. Agustin Padilla se charge des dessins tandis que le scénariste Kyle Higgins et l’artiste Trevor McCarthy filent un coup de main pour étoffer le personnage dans des back-ups, mais David Hine semble bien être la force motrice de toute l’opération. Il est à noter que la traduction du nom du héros est loin de faire l’unanimité en France, celui-ci devenant le Parkoureur en raison de sa pratique du parkour, une discipline consistant à se déplacer dans un milieu urbain en utilisant son environnement comme des obstacles à franchir.

Nightrunner (Le Parkoureur dans la version française), le représentant de Batman à Paris !
Nightrunner (ou Le Parkoureur dans la version française), le représentant de Batman à Paris !

Là où la chose devient intéressante, c’est que le scénariste décide de sortir des sentiers battus et de choisir comme porteur du symbole de la chauve-souris un jeune Français d’origine algérienne du nom de Bilal Asselah, habitant la banlieue de Clichy-sous-Bois dont les émeutes de 2005 avaient fait grand bruit jusque dans les pays anglo-saxons. Cette décision provoque un véritable raz-de-marée de réactions sur les sites internet américains ne cachant souvent pas leur penchant très conservateurs (pour ne pas dire réactionnaires) où l’on a pu lire des reproches comme de ne pas avoir choisi un « vrai Français » connaissant le « vrai sens de la justice » pour porter le costume. Si les précédents personnages musulmans introduits avait généralement faits peu de bruits, ces réactions négatives vont faire parler de Nightrunner jusque dans les medias traditionnaux, lui offrant ironiquement une publicité plus large que prévue. En France les réactions sont proportionnellement bien plus modérées, si l’on trouve bien quelques articles sur des sites orientés vers l’extrême-droite faisant le même type de remarques que les réactionnaires américains, la plupart des journaux en ayant parlé le faisait principalement pour évoquer les polémiques ayant lieu outre-Atlantique. Les gros points communs entre les différents articles issus deux pays restent les commentaires où bien souvent les remarques et arguments ne volent pas très hauts, et la méconnaissance (voire la mauvaise foi) des auteurs sur les comic-books en général.

Bruce Wayne ne semble pas du même avis que les détracteurs de Nightrunner...
Qu’importe les critiques, Batman Incorporated semble décider à embaucher Bilal Asselah pour leur branche parisienne !

En se penchant sur les arguments des « anti-Nightrunner », on remarque que trois reviennent régulièrement et souvent ensemble : l’incapacité de Batman à trouver un « vrai Français » comme représentant, l’impossibilité pour un musulman de comprendre le « vrai sens de la justice » et, encore plus absurde, le fait que de voir un super-héros musulman embrouillerait l’esprit des gens habitués à voir l’islam présentée de manière négative. Pour le premier point on en revient aux fameux débats identitaires qui ont toujours existés et qui sont revenus sur le devant de la scène pour les populations issues de pays musulmans depuis 2001 ; il n’est pas question ici de se lancer dans cette réflexion, ce site n’a pas vocation à faire dans le débat politique, et encore moins la polémique, mais il convient toutefois d’admettre que cette histoire de « vrai français » est ridicule puisque Bilal est de nationalité française et peut donc prétendre comme n’importe quel autre citoyen du pays à être le représentant local de Batman Incorporated. La seconde accusation est assez bancale, un blogueur américain reprochant à Bilal de ne pouvoir comprendre le « vrai sens de la justice » car il est issu d’une « minorité oppressée » et non pas de la population des « vrais Français » ; maladroite, cette formulation aurait plus de sens si l’auteur s’interrogeait sur les motivations du personnage en lisant tout simplement ses premières aventures où si la situation de son quartier semble le pousser à adopter un comportement agressif il finit très vite par suivre les pas de la philosophie de Batman (de n’user de la violence que lorsque la situation l’exige et de se retenir le plus possible dans ses coups) ; les accusations de ne pas pouvoir comprendre le sens de la justice de par les origines algériennes du personnage relèvent elles par contre d’un racisme primaire inspiré par les pires clichés circulant sur les musulmans. Enfin vient l’argument absolument absurde qui voudrait que les lecteurs (américains surtout) ne pourraient pas comprendre qu’un super-héros soit musulman car l’islam est montrée quotidiennement comme une religion violente et néfaste ; ici on nage totalement dans la xénophobie et la propagande antimusulmane, les défenseurs de cet argument niant jusqu’à l’existence de représentations positives de cette religion dans leur pays, ignorant que le but de ce personnage est justement d’aller dans le sens du combat des clichés et, purement et simplement, refusant que l’on puisse justement sortir de cet affrontement entre les religions et cultures. De toute évidence ces critiques ne concernent jamais les épisodes introduisant le personnage, et à plus forte raison puisque celles-ci ont été faites pour la plupart avant leur parution !

Paris, ses tags révoltés, ses émeutes avec vue sur la Tour Eiffel...
Paris, ses tags révoltés, ses émeutes avec vue sur la Tour Eiffel…

David Hine a expliqué le choix d’un Français d’origine algérienne à la fois pour se défendre face à ces commentaires comme pour répondre à ceux qui le questionnaient sur cette décision sans arrière-pensées nauséabondes. Il a ainsi confié que Bilal était pour lui aussi bien son message face au sentiment d’intolérance s’étant installé aux États-Unis que le meilleur représentant d’une nouvelle génération française issue de la diversité et au plus proche de l’actualité du pays. Il a ainsi expliqué que «Le processus d’écriture d’une histoire est complexe et [qu’il a] fait attention à beaucoup de choses. Sous le gouvernement Sarkozy, l’actualité française est dominée par les banlieues et les problèmes de ses minorités ethniques. C’est devenu inévitable que [son] héros ait une origine franco-algérienne » et que pour lui il avait « créé le type de héros de comics [qu’il souhaiterait] voir [s’il était] Français » [6]. Ainsi la rage de Bilal trouve ses origines dans des émeutes rappelant celles de 2005 qui ont secoué Clichy-sous-Bois, étant déclenchées ici par la mort de son ami Aarif abattu par des policiers ! L’auteur peut sembler commettre ici une maladresse, car si les émeutes réelles commencent bien par la mort de deux jeunes des banlieues, ceux-ci n’ont pas été abattus par la police mais la fuyait avant de mourir accidentellement en tentant de se réfugier dans un transformateur électrique. David Hine a pu toutefois s’inspirer d’émeutes plus anciennes comme les différentes émeutes nées dans les années 90 suite à des morts causées par la police à Vaulx-en-Velin, Rouen ou encore Lyon [7]. Il ne faut pas non plus oublier que nous sommes ici dans un comic-book où les carrières des justiciers masqués commencent très souvent par la mort d’un proche, et encore plus lorsqu’il s’agit de l’écurie Batman. Les maladresses vont davantage se retrouver dans l’impression que la France est continuellement en état de quasi-guerre civile dans ses banlieues ou dans des petits détails comme un tag « vive la rage » qui ne sonne pas très naturel à nos oreilles. Vision étrangère de notre situation politique à travers le prisme de ce que les médias leur montrent ou situation grossit pour les besoins de l’histoire, cela ne donne pas moins un contexte intéressant pour le développement du personnage. Et le lecteur chevronné sera sans doute heureux de découvrir un héros de l’Hexagone qui ne s’appelle pas Pierre, Jean ou Jacques patrouillant sur sa mobylette avec une marinière sur le dos, un béret sur la tête et une baguette sous le bras…

Une représentation positive de l'islam mais pas sans petits erreurs
Une représentation positive de l’islam mais pas sans petits erreurs…

La place de l’islam est assez intéressante dans cette histoire puisque c’est par la religion que le personnage va retrouver la raison alors qu’il veut se lancer dans une croisade pour venger son ami. En effet, sa mère l’implore de s’assagir en prenant appui sur les enseignements de l’islam, l’auteur délivrant par-là un message positif vis-à-vis de cette religion qui comme les autres cultes monothéistes peut prôner la raison et la retenue. Il est intéressant de noter que le scénariste a poussé ses recherches en précisant que la famille Asselah est sunnite, courant dominant en Algérie, alors que la plupart des œuvres (aussi bien littéraires qu’audio-visuelles) ont tendance à ne pas faire grand cas des différents courants constituant l’islam, la seule autre exception notable étant Dust qui appartient également à cette branche de la religion. Mais le scénariste n’évite pas pour autant certaines erreurs qui auraient pu être facilement évitées par quelques recherches comme le fait de faire se prier côte-à-côte Bilal et sa mère alors que la religion musulmane veut que la femme soit placée derrière l’homme et, surtout, que le jeune ne soit pas représenté pieds nus sur son tapis de prière. Le message véhiculé par Nightrunner est finalement assez clair, il penche sans équivoque vers l’acceptation de l’autre tout en touchant du doigt des problèmes sociaux très profonds allant de l’intégration des minorités aux conditions de vie dans les quartiers défavorisés, des thèmes qui touchent finalement autant le public français qu’américain. Le personnage reste par contre depuis cantonner à de très rares apparitions dans les titres liés à Batman, sans que l’on sache si DC a cédé aux critiques ou n’a juste aucun projet pour lui dans l’immédiat. Dans l’interview citée précédemment le scénariste annonçait avoir une histoire concernant le jeune héros à proposer à DC, mais ne semble pas avoir about.

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Si les origines arabes (et donc musulmanes) de Damian ne son jamais évoquées, elles transparaissent davantage dans de sa version alternative d’Ibn al Xu’ffasch.

Malgré la faible exploitation de Nightrunner l’éditeur a frappé un grand coup, mais a négligé une piste liée également à l’univers du justicier de Gotham City qui aurait pu avoir un plus grand impact encore. Car comme mentionné plus haut si Ra’s al Ghul n’est jamais présenté comme un musulman, exploiter cet élément aurait pu être intéressant dans le cas de son petit-fils Damian, personnage très particulier car également fils de Bruce Wayne ! Né d’une nuit d’amour entre Bruce et Talia al Ghul consommée dans le graphic novel de 1987 Batman: Son of the Demon signé Mike W. Barr et Jerry Bingham dont la place dans la continuité a longtemps été incertaine, le personnage est finalement introduit officiellement dans la continuité par Grant Morrison en 2006 dans Batman #655 et devient le fil rouge de son passage sur le Chevalier Noir qui s’est achevé l’an dernier. Jouer sur le fait que l’héritier de Batman soit lui-même d’ascendance musulmane serait une porte ouverte pour de nombreuses intrigues en rapport avec le climat de méfiance qui règne encore envers les communautés musulmanes dans les sociétés occidentales. Ce point n’est malheureusement jamais abordé, et s’il l’avait été peut-être aurait-il a son tour généré son lot de polémiques, mais ce non-dit reste peut-être un coup manqué (volontairement ?) de la part de DC sur la question de la diversité dans les comics; que Damian soit croyant ou non son lien avec la religion aurait pu amener à des histoires concernant son point de vue sur le traitement et la place des musulmans dans la société américaine comme il en sera question dans l’exemple qui va être abordé ci-dessous. On peut noter qu’avant cette « version officielle » du fils de Bruce et Talia, Mark Waid et Alex Ross introduisent en 1996 dans Kingdome Come (une version futuriste de l’univers DC) une versions alternative assumant plus directement les origines arabes du personnage sous le nom d’Ibn al Xu’ffasch, littéralement « le Fils de la Chauve-Souris » ; néanmoins il s’agit ici surtout d’une dénomination construite sur le modèle du nom de son grand-père maternel, Ra’s al Ghul signifiant « la Tête du Démon », sans que cela ne démontre un réel attachement du personnage à l’islam.

M for Muslim ?

Une révélation fracassante pour les lecteurs... et les personnages !
Une révélation fracassante pour les lecteurs… et les amis de l’héroïne !

L’année suivante va continuer de mettre l’Algérie à l’honneur dans les comics au travers d’une petite que le scénariste Peter David va lâcher dans sa série X-Factor. Véritable ovni dans le monde des X-Men, le titre suit les aventures oscillant entre l’absurde et le très sérieux d’une équipe d’enquêteurs mutants qui tient plus de la famille dysfonctionnelle que des super-héros sauveurs du monde. La série n’hésite pas à aborder des sujets sensibles comme l’homosexualité qui est traitée d’une manière si remarquable qu’elle vaudra au scénariste d’être récompensé en 2011 par le GLAAD, une très respectée association LGBT. Dans X-Factor #227 Peter David s’attaque au sentiment antimusulman très présent aux États-Unis en faisant s’opposer Monet St. Croix alias M et Guido Carosella dit Strong Guy (traduit parfois par Malabar) à une manifestation hostile aux musulmans, assimilés dans l’ensemble à des terroristes en train d’envahir le pays (avec les sempiternelles accusations un peu fantaisistes mais malheureusement courante dans la vraie vie de camps d’entrainement terroristes cachés sous les mosquées…). Énervée à la fois par la haine de la foule envers les musulmans puis aux mutants à qui ils les comparent, M finit par s’opposer à elle en leur criant son appartenance aux deux groupes! Le personnage de Monet avait déjà été traitée dans la première partie de l’article où il était indiqué que son appartenance à la foi musulmane n’était jamais évoquée, et cela devient encore plus flagrant ici puisque bon nombre de lecteurs ont été totalement surpris de découvrir que ce personnage était affilié à cette religion. Peter David avait bien anticipé la chose puisque dans l’immédiat Guido ne croit pas sa collègue, pensant qu’elle avait joué sur ses origines algérienne juste pour effrayer la foule dans un élan de colère.

Une nouvelle facette du personnage qui s'intègre parfaitement à son caractère piquant !
Une nouvelle facette du personnage qui s’intègre parfaitement à son caractère piquant !

Si on est loin de l’impact médiatique qu’a pu avoir Nightrunner, cette révélation qui n’est finalement  qu’une confirmation de ce dont on pouvait se douter depuis des années laisse circonspects beaucoup de lecteurs. Pour certains, il parait aberrant que Monet soit une musulmane suivant le comportement qu’elle adopte depuis des années : femme forte ne rechignant pas aux tenues légères, aux shoots photos très peu vêtues et à fricoter hors mariage, elle semble bien loin de l’idée que l’on se fait généralement d’une musulmane croyante, ou tout du moins « classique » [8]. Or, à aucun moment Peter David ne l’a fait dire qu’elle est une musulmane pratiquante, ni même une bonne musulmane tout court, la réaction de Monet et sa soudaine affirmation d’appartenance à la religion musulman qu’elle rappellera dans bons nombres d’épisodes suivants lors de croustillants dialogues avec ses collègues peuvent être interprétées comme un ras-le-bol face à une situation qui touche une culture dont elle se sent proche sans pour autant qu’elle s’y plie pour organiser sa vie. La force de Peter David est d’ajouter une nouvelle dimension à un personnage dont il ne modifie absolument pas l’essence, en affirmant par là une nouvelle héroïne musulmane forte qui n’est ni un cliché d’humilité comme l’être un peu trop Dust par moment ni une femme dont la libération passerait par un rejet total de sa religion. L’auteur se permet même de faire de l’humour avec la situation, comme dans X-Factor #234 où une Monet à nouveau en colère fait évacuer un étage de l’Empire State Building en se présentant comme le « pire cauchemar » des touristes : « une mutante musulmane super-forte qui a ses règles » ! Par ce nouveau statu quo Peter David fait également entrer davantage l’acceptation des musulmans dans le giron des X-Men, chose déjà légèrement abordée avec Dust mais qui s’était tassée depuis que la jeune mutante était devenue une simple silhouette du décors du QG des héros mutants.

Si même JJJ se met à prôner la paix e l'amour, c'est que le message passe !
Si même JJJ se met à prôner la paix e l’amour, c’est que le message passe !

Si X-Factor #227 critique très sévèrement mais avec brio les manifestations hostiles à l’islam et à l’amalgame entre musulmans et islamistes, le scénariste se paie le luxe de dépasser ce débat pour emboîter le pas sur celui de l’immigration et des questions de droit du sol. L’impact de l’épisode est renforcé par le fait que tout ceci se passe à New York qui tient une place privilégiée dans ces débats depuis le 11 septembre 2001 et qu’une grande leçon tolérance est donnée par son maire fictif dans l’univers Marvel. L’ironie est d’ailleurs renforcée par l’identité de ce maire qui n’est autre que J. Jonah Jameson, le patron de journal le plus irascible des comics qui n’a de cesse depuis cinquante ans d’imputés aveuglément toutes sortes de crimes ou de menaces à venir à Spider-Man (et même à la plupart des autres super-héros) simplement dicté par sa propre haine (ou peur ?) des héros masqués ! Par son discours appelant à un arrêt des méfiances injustifiées usant sans trop de pathos d’un rapide rappel de la façon peu glorieuse dont les États-Unis se sont construits, le personnage donne au lecteur une leçon de tolérance directement par les mots que le scénariste met dans sa bouche et indirectement par la preuve qu’il incarne, celle que même une personne comme lui qui a été prompt à mettre sur le dos d’une minorité (les surhumains dans ce cas fictif) tous les malheurs du monde peut finir par changer son point de vue et accepter que le monde n’est ni blanc ni noir. Avec la fin récente de la série X-Factor, Monet quitte le giron de Peter David qui ne retient presque aucun des membres pour sa relance de la série baptisée All-New X-Factor, laissant à la fougueuse héroïne l’occasion d’intégrer la cour des grands dans la série X-Men de Brian Wood qui n’a pour l’instant pas indiqué vouloir exploiter le background religieux de ses personnages…

Quand la tolérance en a pour son argent

Un projet original à tous les niveaux
Un projet original à tous les niveaux.

Parallèlement les choses continuent de bouger du côté des tentatives officielles d’améliorer les relations entre le monde américain et celui des pays musulmans, Barrack Obama jouant même indirectement un rôle dans la création d’un comic-book allant dans ce sens ! L’idée est née de la collaboration entre les studios américains de Liquid Comics et Open Hands Initiative, une organisation à but non-lucratif fondée par le philanthrope Jay T. Snyder, inspiré par un discours destiné au monde musulman donné au Caire par Barrack Obama en 2009 [9], avec comme but de promouvoir l’amitié entre les États-Unis et le reste du monde. L’organisation met en place à Damas en aout 2010 une rencontre entre vingt-six jeunes états-uniens et syriens handicapés afin qu’ils créent ensemble un personnage qui répondraient aux attentes de ce qu’ils souhaiteraient voir dans les comic-books. De cet improbable projet nait le Silver Scorpion, un jeune super-héros syrien… en fauteuil roulant !

L'histoire se veut très engagée et touche des sujets sensibles...
L’histoire se veut très engagée et touche des sujets sensibles…

Derrière cet alter-égo se cache Bashir Bari, un jeune syrien de la ville fictive d’Arab City (on est plusque jamais dans un comic-book) qui se retrouve en fauteuil roulant après un tragique accident lui ayant coûté ses jambes. Rempli de colère de par sa situation, le garçon verra sa vie transformé lorsqu’une mystérieuse force le choisira comme gardien de son pouvoir et le transforme en Silver Scoprio, un super-héros en fauteuil roulant qui combat le mal par la force de sa volonté et de son esprit ! Le design et le concept peuvent paraître assez étranges de premier abord, mais plusieurs messages positifs transparaissent : encourager les personnes (et notamment les enfants) souffrant de handicaps physiques graves à ne pas renoncer aux joies de la vie et à se dépasser, mais aussi à accepter et respecter l’autre malgré ses différences. Ce dernier point nous intéresse tout particulièrement ici, car si l’autre semble concerner de prime abord les personnes handicapées, il s’agit aussi d’un appel à la tolérance entre les peuples d’origines culturelles et religieuses différentes, visant particulièrement les tensions entre chrétiens et musulmans. La religion du personnage semble ici relever plus du symbole que de l’enjeu scénaristique centrale, et est quasiment occulté par le concept de l’enfant handicapé, figure tirant inexorablement sur les cordes sensibles. La chose se révèle toutefois intéressante lorsqu’on la remet dans son contexte de création qui reste une formidable initiative et s’avère même être un peu plus fouillée si l’on y regarde de plus près, puisqu’on a là un savant mélange du contexte de la vie quotidienne syrienne avec les canons du récit super-héroïque, genre américain par excellence.

...mais a quand même droit à son lot de scènes tout ce qu'il y a de plus classique pour un comic-book de super-héros !
…mais a quand même droit à son lot de scènes tout ce qu’il y a de plus classique pour un comic-book de super-héros !

Si les enfants ont donné les idées à suivre pour la création du personnage et de son univers, le récit qui en a découlé n’est pas moins l’œuvre des professionnels chevronnés Ron Marz et Ian Edington pour le scénario et des artistes Edison George pour les dessins intérieurs et Mukesh Singh pour la couverture. Dès 2010 le projet est remarqué et soutenue par la Clinton Global Initiative, une ONG parrainée par l’ancien président Bill Clinton qui dit du Silver Scorpion que « ce comic-book aidera à établit la confiance et la compréhension entre les cultures, et à encourager les enfants handicapés » [10]. Le projet sort sous la forme d’un graphic novel en 2011, d’abord dans les pays arabes puis en anglais aux États-Unis où la critique se montre favorable plus pour le message d’ouverture d’esprit porté à la fois par le processus créatif et l’histoire que par les trouvailles scénaristiques de cette dernière. La presse aura été plutôt favorable envers ce personnage, louant à chaque fois l’opération et ses visées, et si le livre n’est pas un best-seller l’opération fait asse parler d’elle pour que MTV décide de l’adapter en motion comics [11] ! Toujours inédit en France actuellement, le graphic novel a été ressorti en partenariat avec Dynamite aux États-Unis en janvier 2013.

Feux vert pour un véritable super-héros musulman de premier plan

Quand Green Lantern se la joue Jack Bauer...
Quand Green Lantern se la joue Jack Bauer…

Par sa faible utilisation par rapport à son impact médiatique, Nightrunner prend quand même rapidement des airs de pétard mouillé. DC ne va pourtant pas en resté là et c’est dans les pages de la seconde licence la plus populaire à ce moment-là que va apparaître Simon Baz en 2012, le nouveau Green Lantern terrien ! La série est alors écrite par Geoff Johns qui en a fait une franchise très lucrative depuis quelques années, et cette fois-ci les objectifs sont un cran au-dessus de ceux qui motivaient Nightrunner puisqu’il s’agit ni plus ni moins que de remplacer le Green Lantern principal, Hal Jordan, à la tête de la série éponyme ! Le scénariste est américain mais a des origines libanaises et va mettre une partie de sa personne dans le personnage, citoyen américain d’une famille également d’origine libanaise habitant de de Deaborn, une ville du Michigan proche de Détroit dont Johns est originaire. La licence ne finit pas de faire parler d’elle cette année-là puisque le premier Green Lantern historique, Alan Scott, est réimaginé comme un homme d’affaire homosexuel sur le monde parallèle d’Earth-2. L’un des avantages de Johns pour écrire le personnage est qu’avec le passage à l’univers des New52 il a pu gagner du galon chez DC en devenant l’une de ses principales têtes pensantes, pouvant ainsi avoir les coudées franches pour imaginer un personnage musulman comme il l’entend. Enfin, le scénariste a également noté qu’il y a une petite portée symbolique à voir un personnage de cette religion porter l’anneau vert, cette couleur étant depuis toujours celle associée à l’islam. Simon Baz apparaît pour la première fois dans Green Lantern #0 en septembre 2012 où ses origines sont dévoilées avant de devenir la star du titre principal le mois suivant, la franchise démarrant alors le crossover Rise of the Third Army. Avec ce personnage Johns veut jouer sur la carte déjà un peu trop usée du musulman accusé à tort d’actes terroristes, ce qui en soit peut tout de même se révéler efficace lorsque le but est de dénoncer la méfiance injustifiée envers toute la population musulmane des États-Unis. Le problème c’est qu’ici il le fait d’une manière totalement grotesque, en le faisant tout simplement voler une voiture piégée ! Le ressort du « mauvais moment au mauvais endroit » est un poncif du genre super-héroïque, mais la ficelle est vraiment trop grosse dans ce cas-là. Arrêté et interrogé par les autorités qui le pensent responsable d’un acte de terrorisme, le héros est secouru par un anneau de Green Lantern qui le choisit comme possesseur et alternent entre les combats super-héroïques et la résolution des crimes qu’on lui impute tout le long du crossover.

Tableau de l'Amérique post-11 septembre...
Tableau de l’Amérique post-11 septembre…

On pourrait craindre que vu le départ du personnage, son traitement soit effectuée de manière clichée et maladroite. Pourtant, si Johns n’arrive pas à en faire un personnage de premier plan comme la promotion autour de Simon Baz semblait le laisser entendre (en gros, Hal Jordan a très vite retrouvé sa place à la tête du titre), le traitement du personnage voire de l’islam se révèle assez intéressant pour peu que l’on laisse de côté les intrigues souvent reconnues que peu inspirées des épisodes qui lui sont consacrés. Dans Green Lantern #0, Geoff Johns ouvre son récit par un jeune Simon Baz découvrant avec horreur à la télévision les attentats du 11 septembre 2001. S’en suit le temps d’une page un résumé des conséquences malheureuses que cela a eu sur Simon et son entourage dans les années qui ont suivi : mur d’un mosquée tapissé de messages haineux, railleries et violences à l’école, méfiance et contrôle disproportionné dans les aéroports même dix ans après les évènements… et ce seront là les principaux moments avec les accusations d’appartenance à un groupe islamiste où le personnage est lié à sa religion. La force du personnage est que quoi qu’il lui arrive, l’auteur ne l’écrit pas comme un musulman mais un homme comme les autres, ne tombant pas dans le piège de le présenter comme un croyant pratiquant, ni même vraiment un croyant tout court, parce qu’il est musulman. Le seul autre moment où la religion semble jouer un rôle dans le récit est une phrase indique que le père de Simon lui reproche d’avoir fait marquer « courage » sur son bras alors que la religion musulman interdit les tatouages, une telle situation pourrait d’ailleurs être interprété d’une façon plus pragmatique comme étant un argument d’un père désapprouvant juste le concept des tatouages et être transposable pour un personnage de n’importe quelle autre culture avec l’argument de la religion changé au profit d’un autre. Johns n’oublie pas de montrer l’impact des actes imputés à Simon sur sa famille qui subissent le regard des collègues de travail et même de leur communauté musulmane. Par ce biais Johns essaie peut-être de nous montrer que ce mal qui a déchiré la population américaine a aussi un effet pernicieux dans la communauté concernée, et rappeler l’impopularité des mouvements extrémistes au sein même de l’islam. Si le personnage est bien ancrer dans les réalités quotidiennes des musulmans américains, Johns n’oublie pas d’y ajouter les effets de la crise sur la région de Detroit, la perte du job de mécanicien du personnage jouant un rôle dans sa descente aux enfers suite au vol de la voiture piégée.

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Le personnage mettra au moins tout le monde d’accord sur son look plus que discutable !

Si beaucoup de critique découlent de la première apparition mêlant maladroitement clichés et coïncidences malheureuses, des pseudo-polémiques ont pu être à nouveau lancées sur des sites orientés à l’aile la plus à droite des mouvements conservateurs. L’une des critiques les plus remarquées reste une citation relevée par le Washington Post [12] venant d’un site accusant DC de vouloir montrer les musulmans comme une minorité opprimée et de faire l’apologie du Jihad ! Cette accusation dégoulinent de mauvaise foi par sa négation d’une situation assez tendue pour la population musulmane américaine suite aux attaques du 11 septembre 2001 et parait tout simplement surréaliste, rien n’incitant dans le récit de Johns à prendre les armes au nom de l’islam, les vrais terroristes finissant même par être démasqués. D’autres pointent du doigt le fait que ce Green Lantern porte un masque intégral pour cacher son identité contrairement à ses prédécesseurs ; si effectivement les autres Green Lantern portant un masque se limitent généralement à un simple loup leur fonction est également de protéger leur identité (vu que dans les comics même une simple paire de lunettes peu berner des millions de gens…), et dire que ce n’est pas normal qu’un super-héros se masque serait remettre en cause quasiment tous les autres, hors il ne viendrait à l’idée de personne de critiquer Captain America (qui est tout de même LE symbole du héros patriotique dans l’esprit des gens) ou Batman de se masquer le visage. De plus, l’usage d’une cagoule recouvrant toute sa tête est pleinement justifiée par son statut de fugitif qui débute sa carrière d’agent des Gardiens de l’Univers. La seule chose pouvant être reprochée au masque est peut-être son design assez moche, mélange improbable entre un masque de catcheur mexicain et de bondage. Les polémiques ont toutefois été moindres que pour Nightrunner, ce qui est assez ironique vu qu’il s’agit ici d’un héros américain et devant occupé un rôle mensuel important. Il est intéressant de noter que pour Earth-2 cela n’a semble-t-il gêné qu’un personnage musulman nommé Khalid Ben-Hassin hérite du casque du Doctor Fate quelques mois plus tard, preuve que le simple fait de ne pas faire de communication ou de ne pas vouloir jouer sur la religion ne fait pas de vague, mais le personnage n’a certes pas l’aura d’un Batman ou d’un Green Lantern. Avant même le départ de Geoff Johns de la franchise Green Lantern ce dernier a rapatrié Simon Baz dans la nouvelle série Justice League of America sans que les nouveaux auteurs des séries cosmiques n’aient montré d’envie de l’utiliser, et avec la fin prochaine de cette série l’avenir du Green Lantern musulman est pour l’instant incertain mais s’il y a de forte chance que le scénariste ne laisse pas croupir à l’ombre sa création.

Un pas toujours plus loin

Un changement de look assez drastique entre l'originale et l'héritière
Un changement de look assez drastique entre l’originale et l’héritière !

Soucieux de ne pas se laisser distancer par DC sur le terrain qu’ils occupaient avant, les décideurs de Marvel ne pouvaient rester les bras croisés. À l’instar de la Distinguée Concurrence l’idée est de créer un héros qui capitaliserait sur un nom déjà établi mais qui contrairement à Nightrunner et Simon Baz serait le personnage principal de sa propre série mensuelle. Le dévolu est jeté sur Miss Marvel, dont le nom est libre depuis que la précédente détentrice du titre Carol Danver [13] a gagné en galon en devenant la nouvelle Captain Marvel. Si le personnage n’est pas le plus connu du large public, depuis quelques années Marvel semble décidé faire de Carol Danvers la figure de proue féminine de son catalogue où les personnages de ce sexe pouvant soutenir une série sur le long terme se font rares, la Maison des Idées ne disposent pas d’une égérie principale comme DC avec Wonder Woman. Choisir de donner à leur nouvelle héroïne musulmane le titre de Miss Marvel peut avoir plusieurs significations. La plus évidente est que leur seul personnage musulman de premier plan actuel soit aussi l’un des deux seuls de l’écurie à porter le nom de la boite, affirmant en quelque sorte la diversité tant voulue dans le catalogue de l’éditeur. Ensuite, il s’agit ici d’une musulmane succédant à un personnage qui pourrait presque être un cliché de l’Amérique iconique dans toute sa splendeur : grande blonde aux yeux bleues aux formes de plus en plus généreuse à mesure que Marvel veuille la rendre attractive pour un plus large public, Carol Danvers est une femme au caractère bien trempée ayant servi par le passé dans l’armée de l’air ; il serait faux de réduire la première Miss Marvel à un fantasme américain en costume moulant, l’héroïne ayant eu droit à de poignantes histoires comprenant la perte de son enfant (en fait une histoire compliqué mêlant des voyages dans le temps) et des problèmes d’alcoolisme, mais force est de constater que son apparence et son background tranchent totalement avec celui de son héritière. Qui plus est, les pouvoirs de deux femmes n’ont rien en commun dans leurs caractéristiques ni leurs origines, le choix de l’identité super-héroïque de Kamala découlant de son admiration pour Carol.

Une série avec une identité graphique aussi originale que sa thématique
Une série avec une identité graphique aussi originale que ses thématiques.

Marvel a lancé en effet la semaine dernière (à l’heure où paraît cet article) un nouveau volume de Ms. Marvel dont l’héroïne se nomme Kamala Kahn, une adolescente de 16 ans du New Jersey née dans une famille d’origine pakistanaise. Si l’on excepte la nationalité américaine des deux femmes, tous semble donc les opposer. Le concept germe suite à une conversation entre les editors Sana Amanar, elle-même également fille d’immigrés pakistanais, et Steve Wacker. Amusé par les anecdotes d’Amanar sur son adolescence et les décalages qui peuvent exister lorsque l’on est baigne dans ces deux cultures parfois antinomiques, Wacker la pousse à concevoir une série basée sur ses expériences de jeunesse. Séduit par l’idée, Marvel lui donne le feu vert pour mettre en place ce projet. Comme bien souvent pour les personnages féminins c’est une femme qui est sélectionnée en la personne de G. Willow Wilson, une scénariste et journaliste américaine qui a la particularité d’être une musulmane convertie et d’avoir vécu au Caire où elle a écrit pour des journaux prestigieux comme le New York Times Magazine, le National Post et l’Atlantic Monthly pour qui elle est la première journaliste occidentale à interviewer le Grand Mouphti Ali Gomaa. C’est également une écrivaine engagée comme le montre sa participation au défunt Cairo Magazine, un journal d’opposition au gouvernement égyptien. Un profil qui sous-entend donc une certaine réflexion sur les sujets liés à l’islam que G. Willow Wilson a déjà pu mettre à contribution dans l’écriture des graphic novels Cairo pour DC/Vertigo en 2007 et Alif the Unseen chez Grove/Atlantic en 2012, remportant avec ce dernier un World Fantasy Award en 2013. Comme on a pu le voir, les héros musulmans des Big Two n’étaient jamais écrits par des musulmans, tout juste dans le cas de Geoff Johns a-t-on un scénariste qui a des aïeux ayant pratiqués cette religion, et pour le coup Marvel met les petits plats dans les grands puisque les deux têtes pensantes du projet ont chacune une véritable expérience de l’islam et une approche réfléchie de par leurs expériences des différences qui peuvent exister entre les cultures associées à cette religion et les États-Unis, Willow ayant même pour elle d’avoir déjà écrit des comics traitant de l’islam. Le dessinateur Adrian Alphona au trait léger assez particulière complète l’équipe pour la partie design, offrant une identité visuelle assez singulière au titre qui participe à son ton très teen, à l’image de ce qu’il avait déjà faite à l’époque où il dessinait les héros adolescents des Runaways.

Comme quoi peu importe la religion, les parents restent les mêmes !
Peu importe la religion, les parents restent les mêmes !

Le personnage a droit à une première courte aventure dans le one-shot All-New Marvel NOW! Point One #1 en janvier 2014 où on nous présente l’héroïne avec déjà ses pouvoirs et son costumes [14]. Il s’agit là de présenter avant tout le personnage, ses pouvoirs métamorphiques, son entourage et le ton assez humoristique de la série qui débarque au début du mois de février suivant. Le premier numéro revient quelques temps en arrière quand Kamala n’a pas encore de pouvoirs, leur acquisition survenant à la toute fin de l’épisode. La jeune fille est écrite comme une adolescente fan des super-héros (et en particulier de Carol Danvers donc) tout ce qu’il y a de plus normal, ses origines pakistanaises passant souvent au second plan. On fait connaissance avec sa famille lors d’une scène de repas avec l’antagonisme presque cliché du père en costard-cravate qui semble bien intégré socialement et du grand frère en habit traditionnel priant avant le repas, le premier critiquant le second de trop s’accrocher à la religion et de se réfugier derrière elle pour refuser de travailler, le second appuyant un peu ces propos par son attitude. Toutefois, si Kamala Kahn se montre à un moment critique envers sa condition de musulmane américaine, c’est sur le coup d’une colère que pourrait avoir n’importe quelle adolescente suite à un incident survenu à une soirée. Cette fête est plus tôt dans l’épisode le sujet à d’une dispute entre Kamala et son père qui ne voit pas d’un bon œil sa fille passer une soirée au milieu d’alcool et de garçons, des inquiétudes que que tout père, musulman ou non, pourrait avoir. Le parallèle avec la condition des femmes et mes différences culturelles de manière plus général semble destiné à être traité au travers de Nakia, son amie turque qui porte le voile et se montre plus proche d’une vision plus traditionaliste de l’islam (notamment en ce qui concerne les garçons et l’alcool), voire à un rejet de l’américanisation symbolisé directement dans les dialogues par son refus de porter le diminutif « américain » de « Kiki ». Les pouvoirs métamorphiques que Kamala obtient à la fin de l’épisode peuvent être vus comme une métaphore à la fois du passage à l’adolescence mais aussi du conflit culturel qui habite la jeune femme, dans une logique que ne renieraient pas les meilleures histoires à sous-texte engagé des X-Men.

Sur le plan critique le projet a eu aussi bien des avis enthousiastes lors de son annonce que de très bonnes reviews de l’épisode où sont loués aussi bien les thèmes abordés que la qualité de l’écriture ou des dessins. Vous pouvez d’ailleurs retrouvez les avis du site qui sont très positifs du côté du ComixWeekly #181 [15] mais beaucoup plus mitigés pour ce qui est du Tops et Flops de Sam [16] qui reproche au titre d’être finalement trop consensuel ; l’auteur de cet article se rangera dans le premier camp, charmé par les qualités du titre qui pour la plupart pourraient très bien s’appliquer à une série ne traitant pas de l’islam. Évidemment l’annonce de la série a suscité quelques critiques négatives mais rien de comparable aux levées de boucliers que l’on a pu voir pour Nightrunner ou Simon Baz, l’affaire la plus marquante étant celle d’un twit de l’animateur Conan O’Brien où il présentait le personnage comme ayant « plus de pouvoirs que les autres femmes de son mari », ignorant sciemment qu’il s’agissait d’une adolescente de 16 ans dont la situation n’a strictement aucun rapport avec la polygamie ; devant la flopée de protestations qu’a engendré ce message, l’animateur s’est résolu à l’effacer de son compte [17]. Si Ms. Marvel #1 a été bien reçu, l’avenir nous dira si le public continuera de suivre ou non les aventure d’une héroïne musulmane, les séries mettant en scène des personnages principaux féminins ou issus de la diversité ayant souvent du mal à trouver leur public et se maintenir sur le long terme.

Vers l’étape finale ?

Les maisons d’éditions américaines semblent donc être passées à une étape supérieure dans la représentation des musulmans dans les comics, bien décidées à imposer des personnages de premier plan de cette religion. Depuis 2009 on peut constater une certaine évolution : on passe de personnages totalement originaux avec Faiza Hussain a une politique peut-être plus porteuse d’héritiers que son Nightrunner, Simon Baz/Green Lantern et Kamala Kahn/Miss Marvel où l’on capitalise sur l’aura de héros déjà bien installés pour permettre aux nouveaux protagonistes musulmans d’exister aux yeux du large public. Avec la nouvelle Miss Marvel on atteint enfin l’étape du héros qui porte à lui tout seul sa série, si le succès est au rendez-vous peut-être les Big Two (ou même les autres maisons d’éditions) tenteront de lancer des personnages totalement originaux à la tête de séries mensuelles. On remarque également que la proportion de personnages caricaturaux de type Arabian Knight a eu tendance à très  fortement, mais surtout qu’une bonne partie de ces nouveaux personnages musulmans introduits sont des femmes, peut-être parce qu’elle offre un angle plus large d’approche par rapport aux débats qui ponctuent les cultures musulmanes. Un point commun rassemble également tous ces personnages introduits dans les comics américains : il s’agit toujours d’enfants d’immigrés baignant dans une culture d’adoption à laquelle ils sont pleinement intégrés quels que soient leurs rapports avec la religion musulmane. Si comme pour un personnage comme Dust l’un des buts est d’apprendre à accepter les différences de l’autre et de briser de nombreux clichés, certaines des thématiques qui sont abordées divergent : avec la jeune mutante afghane c’est l’Amérique qui est vu par les yeux d’une étrangère venant d’un pays musulman (ou inversement la vision de l’Amérique sur un peuple étranger) alors que pour la plupart des exemples de cette article on aborde le sujet de la place et de la vision des citoyens musulmans dans la société en crise qui l’a adoptée (américaine, britannique ou française ici). Monet est intéressante car elle rentre un peu dans ces différentes catégories, véritable sac de nœuds au niveau de la citoyenneté ayant émigrée aux États-Unis, tout en étant un cas à part puisqu’elle crée la polémique quand son entourage et les lecteurs découvrent seulement après plusieurs années qu’elle est musulmane. La question de l’acceptation de la tolérance est en fait détournée ici par la situation du secret insoupçonné qui éclate au grand jour et dépasse en quelque sorte les débats culturels pour toucher à celui des liens d’amitiés voire familiaux qui sont censés dépasser les différences.

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Dans le monde réel comme dans celui des super-héros, le combat contre les préjugés est loin d’être terminé…

Il est également très intéressant de se pencher sur les auteurs derrières ces créations et de signaler que ce sont majoritairement des non-Américains, et plus précisément des britanniques (les scénaristes non-anglophones étant très rares dans le mainstream, à titre d’exemple seule une petite poignée de scénaristes français ont pu travailler directement sur les héros Marvel [18]). Même si on peut les penser plus proches des États-Unis que les scénaristes originaires d’autres pays, les Britanniques n’en garde pas moins pour la plupart un regard très différent, peut-être plus détaché, sur le 11 septembre et les événements qui en ont découlé ou la religion musulmane, sans compter que les auteurs ont généralement une façon d’aborder et d’écrire les super-héros relativement différente des Américains. Si beaucoup de scénaristes britanniques se sont fondus dans le moule d’écriture à l’américaine privilégiant l’action, un grand nombre d’entre eux ont gardé l’habitude d’y mêler un sous-texte amenant à la réflexion et de présenter des personnages, bons comme mauvais, assez ambiguës. Il faut aussi constater que les têtes pensantes américaines derrière les créations abordées dans cet articles ont tous des liens avec l’islam, qu’il soit direct pour Sana Amanar et G. Willow Wilson ou peut-être moins forts mais tout de même existants dans le cas de Geoff Johns ; s’il peut paraître réducteur de penser que seuls les musulmans peuvent écrire les musulmans, il faut tout de même avouer qu’une personne n’ayant pas des connaissances très précises, voire un passif liée à cette religion et ses nombreuses cultures, ne serait pas le meilleur candidat pour écrire sur le sujet tant que les clichés et la mésentente seront encore à ce point encrée dans les sociétés. Si certains doutent que ces créations ont une impact finalement autre que les polémiques issues de commentaires émanant de milieux très conservateurs, et souvent complètement aux fraises qu’on leur demande de détailler leurs connaissances sur les comics quand ils ne sont pas émis avant la sortie des histoires attaquées, il n’y a qu’à voir les exemples de The 99 et de Silver Scorpion pour comprendre que le potentiel de diffusion du medium existe et qu’il peut bel et bien toucher les deux « camps », sans compter la symbolique très forte qu’ont eu le crossover JLA/The 99 ou le processus créatif de Silver Scorpion dans la réconciliation entre des sociétés déchirées par l’extrémisme religieux et de la méconnaissance de l’autre.

Si l’article vous a interpellé n’hésitez pas à le faire savoir dans les commentaires, le sujet ayant pour lui de faire réagir bon nombre de gens, et je me ferais un plaisir de débattre avec vous ! Si de nouveaux articles sont déjà sur le feu, je me vois par contre (déjà) dans l’obligation de ne pas respecter ma règle d’une publication toutes les deux semaines durant quelques temps, un mal pour un bien afin de pouvoir vous offrir des articles assez dignes pour vous être présentés 😉

[1] Un Skrull sosie de John Lennon issu d’un plan de domination du monde utilisant des grandes figures de la culture des années 60, une idée qui paraît loufoque mais a accouché de ce formidable personnage qui mériterait d’être réutilisé.

[2] Vlad III Basarab (v. 1430-1476), surnommé « l’Empaleur » (en roumain Țepeș), est un prince de Valachie aillant inspiré Bram Stocker pour le personnage de Dracula.

[3] Pour une lecture claire de l’article, il faut rappeler que dans les pays anglo-saxons un editor (et tous ses dérivés comme editor-in-chief, senior editor…) est un responsable éditorial, tandis que pour parler d’un éditeur ou d’une maison d’édition on utiliser le terme de publisher.

[4] On peut dire que la présidence d’Obama est sans doute l’une des plus intimement liées à l’histoire des comics. Ancien collectionneur d’Amazing Spider-Man et de Conan, le président américain n’a jamais caché son amour pour les héros de papiers et de spandex, lançant même non sans humour lors de sa première campagne présidentielle qu’il était né sur Krypton ! L’industrie lui aura d’ailleurs rendu la part belle, à la fois par les hommages ou pastiches réalisés par de nombreux dessinateurs de la veille de son élection à aujourd’hui tout comme le fameux épisode où Spider-Man sauve le président (l’histoire secondaire d’Amazing Spider-Man #583, publiée en janvier 2009 une semaine avant l’investiture d’Obama), épisode d’ailleurs le plus vendu des années 2000 !

[5] http://www.youtube.com/watch?v=xULeq3JrAEk

[6] L’interview complète est à lire dans l’excellent article dédié à la création de Nightrunner dans Comic Box #69 de mars/avril 2012, qui n’a malheureusement pas pu être lu à nouveau pour la rédaction de cet article.

[7] Pour plus de détail, une célèbre encyclopédie en ligne vous fournira des articles assez complets sur ces évènements.

[8] Peter David n’a pas non été aidé par le développement assez chaotique de Monet depuis ses origines. En effet lorsque Scott Lobdell crée le personnage celle-ci est habitée par l’esprit de ses deux petites sœurs et le scénariste ne prévoyait pas qu’il y aurait une « vraie » Monet mais uniquement un personnage créé par la fusion des cadettes. Par la suite le développement de ses origines sera souvent confus et contradictoire, notamment aux sujets de ses nationalités, Monet ayant un passeport bosniaque car née à Sarajevo (la Bosnie étant d’ailleurs un pays à majorité musulmane), un passeport algérien par sa mère (alors que la citoyenneté algérienne ne peut normalement pas se transmettre par les femmes) et un passeport français (par son père qui y a été l’ambassadeur de Monaco)… mais il n’a jamais été dit qu’elle avait la nationalité monégasque qu’aurait dû lui transmettre son père !

[9] http://www.youtube.com/watch?v=B_889oBKkNU

[10] « The comic-book will help to establish trust and understanding between cultures, to empower young people with disabilities.”

[11] http://geek-news.mtv.com/2012/05/04/silver-scorpion-webcomic/

[12]http://www.faithstreet.com/onfaith/2012/09/07/dc-comics-introduces-new-muslim-superhero?wprss=rss_social-nation headlines&Post+generic=%253Ftid%253Dsm_twitter_washingtonpost

[13] Si Carol Danvers est la première à porter le pseudonyme elle n’est pas la seule pour autant, Sharon Ventura l’ayant porté avant qu’il repasse à nouveau à Carol Danvers durant les années 2000, sans oublier la brève imposture de Karla Sofen alias Moonstone du temps des premiers Dark Avengers.

[14] Dans les faits la première apparition dans un comic-book de Kamala Kahn est dans les pages de Captain Marvel #14 en août 2013 où la scénariste Kelly Sue DeConnick a demandé à ce qu’elle soit placée dans les décors d’une scène, mais il s’agit ici surtout d’un clin d’œil à sa future apparition destiné aux lecteurs les plus attentifs.

[15] http://www.comixity.fr/2014/02/comixweekly-181/

[16] http://www.comixity.fr/2014/02/tops-et-flops-de-la-semaine-112/

[17]http://www.businessinsider.com/conan-obrien-deletes-racist-tweet-about-new-muslim-ms-marvel-2013-11

[18] L’auteur de ces lignes en a trouvé trois en les personnes de MM Jean-Marc Lofficier, Fabrice Sapolsky et actuellement Richard Isanove sur Savage Wolverine, et serait redevable à quiconque pourrait lui fournir d’autres exemples pour Marvel. Par des auteurs qui ont pu « travailler directement sur les héros des séries Marvel », on entend ici qu’on exclut les œuvres de type Wolverine : Saudade qui ont été écrits par des Français à destination du marché français en priorité avant d’être traduits pour celui des États-Unis.

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Lecteur assidu de comics et grand amateur de séries TV comme de cinéma, maître-nageur pour poneys à ses heures perdues.

11 Comments

  1. Très très bon article, long, passionnant, enrichissant et bien documenté.
    J’espère que la petite nouvelle, Ms.Marvel arrivera à percer, et que Simon Baz ne tombera pas dans l’oubli, et j’espère surtout des dossiers aussi bon que celui-ci dans les mois à venir sur Comixity !

  2. Merci beaucoup ! Comme je l’ai dit dans l’article d’autres du même type sont déjà sur les rails, mais je vais devoir malheureusement ralentir la cadence de sortie dans les prochains temps pour pouvoir continuer à en faire d’aussi complets.

    Si l’on se fie à une news qui est tombée (évidemment) juste après que j’ai bouclé l’article, Geoff Johns semble avoir encore des projets pour lui dans l’avenir proche, mais je préfère ne rien dire pour ne pas spoiler.

  3. Très bon article ! Très détaillé et très agréable à lire. Merci pour tous ces rappels, tu fais du super boulot !

  4. Eh bien, quel dossier ! Evidemment, ce sont les polémiques sur le Batman français qui m’intéressent le plus, mais le tout est vraiment intéressant et montre bien qu’il y a encore beaucoup de chemin à parcourir.

  5. Sans vouloir jeter de l’huile sur le dossier Monet, un épisode de GenX suggère aussi qu’elle serait appelé à être la future mère de Bishop en plus d’être affiliée (je ne sais comment, peut être son grand-père) avec Gateway!?!

    • Je ne me suis pas lancé dans cette voie vu que ça sortait complètement du propos, mais oui il y a un sacré sac de noeud à démêler dans les origines de Bishop entre Gateway qui est son arrière-grand-père de manière certaine et Storm qui pourrait être sa grand-mère (adoptive en fait ?)… Mais pour Monet comme sa mère je crois que la piste a depuis été plus ou moins officiellement abandonnée, comme celle que Synch aurait pu être son père. De toute façon Bishop est un personnage qui est retconé depuis ses origines puisqu’il était censé être philippin et non afro-américain à la base…

  6. Respect pour ce dossier docte et digeste, avec mêmes les références en fin d’article. J’ai appris beaucoup de choses, et j’ai beaucoup apprécié l’aspect chronologique qui m’a permis de réordonner des éléments que je ne connaissais que de manière très partielle et disparate.

    Merci pour cet éclairage rigoureux et pédagogique.

    • Merci beaucoup !
      L’ordre chronologique s’imposait de lui-même ici par le fait que ces différents exemples se suivaient en se chevauchant que très rarement, ça a pas mal facilité les choses pour construire le plan et ordonner les idées. La difficulté pour ce genre de dossier est surtout de se demander quel public viser en rentrant ou non dans les détails, et aussi de ne pas se perdre dans un simple listing des faits sans réelle analyse.
      Là je dois malheureusement stopper quelques temps les articles par manque de temps, mais d’ici début avril je devrais pouvoir à nouveau fournir des articles de ce type régulièrement.

  7. Pour l’instant je n’ai fait que survoler ce dossier mais ça m’a l’air super intéressant, par contre il y a deux trois trucs qui me dérangent… Parler des origines « arabes (et donc musulmanes) » de Damian Wayne et de ses versions alternatives me semblent être une tournure de phrase plus que discutable, et à l’opposé, dire que les problèmes familiaux de Kamala Khan sont traités comme ceux d’une famille quelconque me semble un peu démago. L’idée cours (et personnellement je ne lui connais pas de contre exemple) que les familles musulmanes ont tendance à être plus protectrices envers leurs jeunes filles et, comme vous le dites, à vouloir les garder éloignées des garçons et de l’alcool. Je ne pense pas qu’il soit anodin que les problèmes familiaux du quotidien que connaît Kamala soient omniprésents dans son comics, là ou ceux des camarades de son âge comme Miles Morales ou Sam Alexander sont plus effacés et où il semblent plus autonomes et libres d’agir (pas entièrement, mais plus…), probablement parce que ce sont des garçons de familles non-musulmanes. A mon humble avis, les inquiétudes du père de Kamala ne sont pas du tout traités comme les inquiétudes d’un père quelconque, mais bien celles d’un père, ayant une culture musulmane, envers sa fille.

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