Unspoken VF : Fury Max Tome 1 – D’une guerre à l’autre

Crédits :

Scénario : Garth Ennis

Dessin : Goran Parlov

Sollicitation : Garth Ennis et Goran Parlov, se retrouvent pour nous faire vivre les missions secrètes de Nick Fury post-Deuxième Guerre mondiale. De l’Indochine à Cuba, Fury a mené des « combats perdus » avant de devenir le directeur emblématique du S.H.I.E.L.D. !

Éditeur VF : Panini Comics

MAX  FURY MAX 1Avis :  après une première mini série dans laquelle Garth Ennis utilisait le personnage de Nick Fury dans le cadre d’une mission commando à la fin de la seconde guerre mondiale, le scénariste reprend la suite de la vie de Fury bien évidemment au travers des conflits qui ont émaillé la guerre froide, puisqu’il nous montre un personnage uniquement animé par la soif de combat. Dans cette optique il plonge Fury dans deux des plus grands fiasco militaires du XXe siècle : la guerre d’Indochine et la baie des cochons, et tout le monde en prend pour son grade. C’est à une véritable leçon d’histoire militaire à laquelle se livre ici Garth Ennis en revenant sur les derniers jours de la guerre d’Indochine et la débâcle de la baie des cochons.

Fury est ici presque plus un spectateur, un narrateur de ces défaites que vraiment un héros de guerre dans toute sa splendeur. En gros il est là pour nous expliquer ce qui a foiré et pourquoi.  Bien évidemment en tant que français, la question de la gestion de la guerre d’Indochine va nous intéresser plus particulièrement, bien qu’elle n’ait guère passionné les français de l’époque qui voyait ce territoire comme trop éloigné pour vraiment s’y investir. Comme vous le savez les comics américains ont une fâcheuse tendance à représenter les français, militaires ou pas, comme de sombres connards arrogants, donneurs de leçons prenant la fuite au premier signe de danger.

Ennis lui même n’avait pas échappé à ce cliché  par le passé, on se souvient notamment d’un arc du Punisher avec un général français présenté comme un pauvre con sans envergure et complètement dépassé.  Vos serez donc ravis d’apprendre que leFury_Max_Vol_1_2_Textless scénariste change ici de braqué et présente certains militaires comme ayant un truc appelé une paire de couilles (un truc assez rare à notre époque de béni oui oui politiquement correcte) . Le scénariste se fend même d’un petit compliment pour nos troupes que ce soit celles de 40 ou de 54 et explique les défaites de manière lucide et cinglante : des bons hommes de troupe et officiers et un commandement à la ramasse complète soit abruti soit incompétent.

Le scénario n’est pas simplement un petit retour historique sur l’Indochine, Ennis confère à Fury un second, qui pour une fois dans l’histoire des sidekicks façon Ennis n’est pas un crétin qui va finir par sauter sa mère …, mais qui pense assez différemment de Fury. Hatherly est ainsi le prototype même de l’américain des années 50 qui n’a pas encore connu la guerre (trop jeune pour la seconde et la Corée) et qui a une foi inébranlable en l’Amérique et ses valeurs. Ainsi quand il rencontre un ancien nazi parmi les forces françaises engagé dans la légion, une putain de montagne qui manifestement n’a eu aucun problème à tuer et massacrer durant la guerre, il ne pourra s’empêcher d’essayer de l’arrêter…Fury apparaît ici un peu non pas comme la voix de la raison, mais du réalisme, oui le type est un monstre mais quand on est en enfer on se fout un peu que le diable soit de votre côté.

Assez bizarrement, Ennis ne remet pas en scène Diên Biên Phu, bien que la bataille soit évoquée, non il la rejoue à plus petite échelle sur un autre terrain. Je ne sais pas d’où vient cette frilosité inhabituelle chez ce scénariste, mais rassurez vous, vous aurez votre compte de massacre ignoble et bien sanguinolent…

Fury en peignoir ou les horreurs de la guerre...
Fury en peignoir ou les horreurs de la guerre…

Mais Ennis nous rappelle que nous ne sommes pas les seuls à avoir quelques défaites au compteur avec l’incident de la baie des cochons, où les américains tentèrent de renverser le régime Castriste par une invasion menée par des opposants. Encore une fois Fury est surtout là pour nous expliquer en détail et de manière assez précise tout ce qui a foiré dans cette opération menée par dessus la jambe par la CIA avec des renseignements foireux et un travail de préparation bien bâclé…Le scénario met alors Fury en première place pour le spectacle, puisqu’il est envoyé sur le terrain avec une petite équipe pour butter Castro lui-même…tentative qui va bien évidemment très mal tournée…

454955203c684ce07aeb4fe8e01a9de8Là encore les illusions du compagnon de Fury seront mises à rude épreuve en face de la réalité…

Vous l’aurez compris il faut avoir deux qualités pour apprécier cette série Fury Max : être versé dans la chose militaire et être un fana d’histoire, puisque le propos de la série est de revenir sur la longue carrière de Fury et donc plus d’un demi siècle de conflits. Un pitch qui me convient vu que je possède ses deux qualités. Ennis nous démontre encore une fois combien d’ailleurs il maîtrise bien l’histoire militaire avec des références aux matériels militaires utilisés, aux événements, au batailles mais aussi au contexte politique de l’époque.

Outre ces batailles, c’est un certain regard que le scénariste porte sur cette période, avec d’une part l’introduction d’un politicien qui accompagne Fury, le soutenant du bout des lèvres mais étant avant tout intéressé par son avancement politique. Ce personnage (surnommé Pug) permet d’avoir le versant politique de ces événements, la position américaine de l’époque et comment ça a chié dans les pendules à certaines moments. Par ailleurs Ennis crée aussi un personnage féminin pas piqué des hannetons, qui bien entendu va se retrouver au pieux avec Fury au bout de quelques pages, mais on comprend bien vite qu’elle n’est pas uniquement là pour écarter les jambes, notamment pour Fury qui commence à s’y attacher …

Dessin : Goran Parlov s’en tire très bien, que ce soit dans la présentation de l’époque, on sent  en effet vraiment le style années 50/60 un peu partout.

Avis : 8.5/10 –  à réserver à un public averti, parce que ça saigne pas mal, ben oui c’est du Ennis, ce n’est absolument pas politiquement correct, mais si une certaine vision de l’histoire militaire vous intéresse alors c’est pour vous !!!

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3 Comments

  1. Est-ce qu’il y a un semblant de continuité avec les précédents récits sur Fury par Ennis sous le label MAX ?

    • Cela dépend, si l’on parle de la première mini du début des années 2000, ce n’est pas le même contexte puisqu’elle se déroulait à l’époque présente alors que là il s’agit plus des mémoires de Fury.

      Par contre je dirais qu’elle est bien en lien avec celle de 2006, Peacemaker qui se déroulait à la fin de la seconde guerre mondiale et dont la fin annonçait justement la guerre froide. De ce point de vue, on peut voir là la suite directe de cette mini.

      • OK merci pour ces précisions ! Je ne pensais pas m’intéresser à cette mini mais tu as su séduire l’étudiant en Histoire que je suis !

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